Vaste sujet puisqu’il est souvent dit « qu’il existe autant d’autisme qu’il existe d’autistes ».
Commençons par dire stop aux préjugés du style : c’est une maladie mentale, une déficience intellectuelle, une sorte de folie qui pousse la personne à se cogner la tête contre les murs, qui ne parle pas ou peu et mal, qui se balance tout le temps, qui fait des crises incontrôlables etc…
Il apparaît clairement que l’autisme n’est pas une maladie, il n’y a pas l’ombre d’un médicament pour guérir de l’autisme, il ne se transmet pas à la manière d’un virus ou d’une bactérie, il ne se guérit pas malgré sa présence dans la classification internationale des maladies de l’OMS. Aujourd’hui, on parle davantage de troubles du spectre autistique. Cependant, l’autisme a longtemps été considéré comme telle, une maladie psychique telle qu’une psychose. A part un certain nombre de psychiatres français, plusieurs scientifiques anglo-saxons et européens s’accordent à dire qu’il n’en est rien. Il semblerait que les travaux en psychanalyse soient encore bien ancrés dans notre pays. A lire : Autisme: quand la psychanalyse racontait n’importe quoi
Si ce n’est pas une maladie, alors qu’est-ce que c’est ?
La plupart des scientifiques parlent de trouble neuro-développemental caractérisé par une déficience liée aux interactions sociales et à la communication cependant d’autres, notamment Laurent Motron, préfèrent parler de fonctionnement cérébral différent qui serait la conséquence d’une formation des réseaux neuronaux via le fonctionnement différent des synapses dans le cerveau.
Laurent Mottron
Judy Singer, psychologue et sociologue australienne suivie de Hugo Horiot, auteur et comédien français vont plus loin et parle de neurodiversité. D’après eux, l’autisme est une autre forme d’intelligence même s’ils admettent que la déficience intellectuelle peut exister chez une personne autiste.
Judy Singer
Selon Hugo Horiot, la personne peut être atteinte de troubles appelés aussi TED (Troubles Envahissants de Développement) indépendamment du fonctionnement autistique.
Pour d’autres, il semblerait aussi que des centaines de mutations génétiques différentes « affectent » principalement la neurologie du cerveau, le métabolisme et le système immunitaire voir même la présence d’anomalies dans la flore intestinale.
Malgré des visions différentes, tout le monde est d’accord pour dire que les garçons ont tendance à être davantage diagnostiqués que les filles et plus précocement.
L’autisme est reconnu comme un handicap au sein de l’ONU qui émet régulièrement des rapports qui mettent à mal la France accusée, notamment, ne pas être suffisamment inclusive et trop institutionnalisée.
Lien vers le site : Handicap : l’experte de l’ ONU ne mâche pas ses mots
Josef Schovanec, docteur en philosophie, parcourt le monde en expliquant que l’autisme est un handicap uniquement dans les sociétés non inclusives. La non acceptation de la différence, le pouvoir d’une norme induisent le fait que la personne autiste se retrouve en situation de handicap.
Si nous réfléchissons quelques instants, par exemple, la couleur de peau n’est pas le reflet d’une « différence » et encore moins d’un handicap puisqu’à la base, il s’agit d’une adaptation de la peau de l’être humain en fonction du climat de la zone géographique, l’observation de Josef Schovanec semble donc bien pertinente, n’est-ce pas ?
Concernant l’autisme et d’autres handicaps comme la Trisomie 21, la surdité etc… Il serait pertinent de se demander jusqu’où la société peut-elle aller dans l’inclusion pour effacer totalement la situation de handicap.
Il existe des tests permettant de diagnostiquer l’autisme : l’ADI-R, l’ADOS, le CARS, ce sont les plus connus et validés par les institutions médicales. Ils doivent être effectués auprès de psychologues spécifiquement formés. Les bilans permettront aux médecins psychiatres de poser le diagnostic officiellement.
Avant le passage de ces tests, il est fortement conseillé :
- D’effectuer un bilan auditif auprès d’un ORL pour éliminer une surdité éventuelle qui pourrait expliquer un retard de langage oral qui fait partie de la liste des symptômes autistiques (même si une catégorie d’autistes, communément appelés Asperger n’ont pas vécu de retard dans le développement du langage oral).
- De s’entretenir avec un pédopsychiatre (médecin psychiatre pour enfants) ou un psychiatre (médecin pour adultes) afin de préciser les différentes étapes du développement de l’enfant et établir un bilan de son fonctionnement concernant ses comportements, ses interactions, son degré d’aptitude à nouer des liens sociaux, à communiquer et interagir avec autrui au sein d’un environnement donné.
Un bilan psychomoteur est parfois nécessaire auprès d’enfants ayant des difficultés de motricité fine et/ou globale. Celui-ci permettra, auprès d’un psychomotricien ou d’un ergothérapeute, de déceler notamment un trouble dys affectant la motricité comme la dyspraxie par exemple. Lien vers nos articles concernant la dyspraxie : Nos dossiers DYSPRAXIE
De la même façon, il peut être jugé nécessaire de passer un examen neurologique pour détecter une pathologie parfois associée à l’autisme comme l’épilepsie. Un IRM peut faire paraître des lésions cérébrales qui peuvent fortement retarder le développement d’un enfant autiste auquel cas, cela pourrait expliquer un certain retard intellectuel et moteur qui ne serait pas forcément dû à l’autisme (voir lié à l’autisme, encore une fois, tout dépend de la définition considérée comme juste).
Certains médecins font faire éventuellement une enquête génétique pour dépister certaines affections connues qui peuvent entraîner des troubles envahissants du développement.
Le diagnostic sera délivré suite à la synthèse (à priori) de toutes les observations et résultats émis et devra être posé par un médecin selon la nomenclature de la CIM-10.
Dernière information, si le DSM5 ne fait plus de distinction interne au spectre autistique autre que la qualification des troubles sociaux et de comportements, la CIM-10 distingue principalement :
- L’autisme infantile (trouble autistique dans le DSM4) appelé aussi autisme de Kanner. Aussi, nous entendons parler de troubles sévères de l’autisme cependant cette définition est à prendre avec précaution car tout dépend à nouveau, de la définition qu’on apporte à l’autisme.
- Le syndrome d’Asperger (sous-catégorie supprimée dans le DSM5) caractérisé par aucun retard intellectuel voir même parfois (pas toujours) un quotient intellectuel élevé.
- L’autisme atypique qui exclut les deux premiers.
Prochainement, nous aborderons les thèmes de l’autisme infantile et le syndrome d’Asperger, en attendant, voici un petit lexique des différents sigles utilisés au sein de cet article.
ADIR : Autism Diagnostic Interview Revised : entrevue semi structurée entre le spécialiste et les parents (ou tuteurs légaux de l’enfant) au sujet d’un enfant âgé de 24 mois minimum ayant un âge mental de 18 mois minimum, d’une durée de 1h30 à 2h. L’entretien recueille un maximum d’informations concernant les interactions sociales réciproques, la communication, le langage et les comportements stéréotypés et répétitifs.
CARS : Childhood Autism Rating Sacle : entrevue semi structurée à propos d’un enfant de 2 ans et +. Sa durée est de 20 à 50 min. Elle traite des domaines suivants : relations sociales, imitation, réponses émotionnelles, utilisation du corps, des objets, adaptation au changement, réponses visuelles et auditives, goût, odorat, toucher, peur et anxiété, communication verbale et non verbale et niveau intellectuel.
ADOS : Autism Diagnostic Observation Schedule : une échelle d’observation dans le domaine des compétences sociales, de communication, du jeu symbolique, l’expression des émotions, des praxies. L’entretien se déroule entre le spécialiste et l’enfant/adulte.
CIM-10 : Classification Internationale des Maladies
DSM-5 : 5ème édtion du DSM (Diagnostic and Statical Manuel of Mental Disorders : manuel diagnostic et statistique des troubles mentaux). Il référence et classifie les critères et recherches sur les troubles mentaux. Il a pour but de constituer un langage commun utilisé par tous les cliniciens, de comprendre l’étiologie et la fréquence d’un trouble et si besoin de mettre en place des actions de santé publique. Cette 5ème édition a été publiée en mai 2013 et fait l’objet de controverses aux Etats-Unis et en Europe. A lire : Psychiatrie : DSM-5, le manuel qui rend fou
Delphine Bessière, pour Dys-Positif